Caractères généraux de l’Indochine coloniale :

A 15 000 km de la France, à la pointe extrême de l’Asie continentale, la péninsule indochinoise, création de la seconde moitié du XIXe siècle, constitue le plus beau fleuron d’un immense domaine colonial, le second du monde après celui de la Grande Bretagne.

En 1939, l’Union indochinoise est composée de trois Etats de population, de civilisation et d’histoire très différents : le royaume de Luang Prabang, le royaume du Cambodge et l’empire d’Annam qui comprend le Tonkin au nord, l’Annam au centre et la Cochinchine au sud.

Grand comme une fois et demie la France, ce territoire est peuplé en 1939 de 23 millions d’habitants de races différentes :

Vietnamiens                     16,5 millions

Kmers                                 3    millions

Thaïs                                    1,2 millions

Moïs-Kas                            1    million

Muongs                                0,2 million

Mans                                    0,1 million

Chinois                                0,3 million

Chams                                     80 000

Européens                               25 000

Les Vietnamines viennent de Chine, d’où ils sont partis à la conquête du Vietnam actuel. Les Cambodgiens arrivent du sud de l’Asie et ont eu, dans le passé, un grand empire, dont la capitale est Angkor. Les Laotiens appartiennent à la race Thaï venant des confins chinois. Ils sont frères des Thaïlandais.

Depuis la fin du XIXe siècle, l’Indochine est sous l’administration directe d’un gouverneur général français qui réside normalement à Hanoï, la capitale du Vietnam. Le pays est divisé en provinces, dirigées par des résidents, fonctionnaires français. L’administration autochtone est étroitement contrôlée.

La France tenait en Indochine des positions culturelles considérables. En dehors des écoles primaires, les établissements d’enseignement public se dénombraient ainsi :

– à Saïgon, 3 lycées et 2 collèges ;

– à Hanoï, le lycée Albert Sarraut et le lycée du « Protectorat » (réservé aux Vietnamiens) et 2 collèges de jeunes filles ;      

– à Dalat, le lycée Yersin ;

– à Hué, un lycée et un collège de jeunes filles ;

– à Pnom Penh, un lycée ;

– à Vientiane, un lycée ;

– à Nha Trang, un collège ;

– à Tourane, un collège.

Sur le plan religieux, les Frères des Ecoles chrétiennes tenaient une quinzaine d’établissements d’enseignement privé.

Il y avait à Hanoï une Université indochinoise comprenant une Faculté de droit, une Faculté mixte de médecine et de pharmacie, qui, ayant succédé à l’Ecole de médecine fondée par Yersin*, formait les médecins indochinois ; une Ecole supérieure de sciences et 3 Ecoles supérieures d’agriculture ; on notait aussi une importante Ecole des beaux-arts (en particulier pour l’architecture).

Des établissements prestigieux avaient été créés : quatre instituts Pasteur (Saïgon fondé par le docteur Calmette dès 1890, Hanoï, Dalat, Nha Trang où travailla le docteur Yersin), un institut français du cancer à Hanoï, la célèbre Ecole française d’Extrême-Orient, notamment à Hanoï et Angkor, un institut océanographique à Nha Trang.

Dans toute l’Indochine, la France a créé un réseau hospitalier important : hôpital Grall à Saïgon, hôpital de Lanessan à Hanoï, un hôpital à Hué, un hôpital à Pnom Penh, un à Vientiane. Tous ces hôpitaux étaient gérés par d’excellents médecins du corps de santé militaire. Il y avait également à Hanoï un hôpital du « Protectorat » où opérait le docteur Huard, futur membre de l’Académie de Médecine.

Enfin des ordres religieux catholiques tenaient une cinquantaine d’hôpitaux privés, réservés aux indochinois, sept léproseries, de nombreux orphelinats et des dispensaires où les soins étaient gratuits. La France a mis en place la vaccination.

Le service de santé publique disposait de médecins militaires et civils français et de centaines de médecins et de pharmaciens indochinois sortis de l’Ecole de médecine de Hanoï. La variole et le choléra ont été pratiquement enrayés.

L’administration française a étendu par d’immenses travaux hydrauliques agricoles (barrages, digues…) la surface des terres cultivées dont les 4/5e sont occupées par des rizières.

En 1939, avec une récolte moyenne de 70 millions de quintaux, l’Indochine était le 5ème pays producteur de riz du monde et, grâce aux excédents de Cochinchine, l’un des trois grands exportateurs, derrière la Birmanie et le Siam.

La production de caoutchouc, en essor rapide, équivalait en 1940 aux besoins français ; avec 70 000 tonnes, elle était la 4ème du monde;

La production anthracite en 1939 atteignait 2 millions et demi de tonnes, dont la moitié était exportée vers la Chine et le Japon par le port de Hongay-Campha.

L’oeuvre française en Indochine a donc été considérable et pourtant, à la veille de la guerre de 1939, certains reproches lui étaient adressés du point de vue de la politique générale, de l’exploitation économique et du traitement discriminatoire des autochtones.

L’opinion était donc loin d’être dans sa totalité ralliée à la France.

la conquète de l'indochine

la conquète de l’indochine

Avant l’effondrement de la France en mai-juin 1940, l’organisation territoriale de la France en Indo-Chine comprend quatre protectorats (Tonkin, Annam, Cambodge et Laos) et une colonie (Cochinchine).

les terrictoires en 1940

les terrictoires en 1940

Un traité est signé avec le Japon le 30 août 1940 : l’Indo-Chine demeure sous l’autorité du gouvernement de Vichy, représenté par l’amiral Decoux,

amiral delcoux avec les représentants japonais

amiral decoux avec les représentants japonais

mais en accordant d’importantes concessions militaires et économiques aux Japonais

 

L’Amiral Decoux, frustré, écrit au gouvernement :
– « il vaut mieux perdre l’Indochine en la défendant qu’en la trahissant ».

L’arrêt des barbares nippons aux portes de l’Indochine est incompréhensible si l’on ne tient pas compte du sacrifice sauveur du maréchal Pétain en France. Un gaulliste, Claude de Boisanger, conseiller diplomatique du Gouverneur général dès novembre 1941, admet que «  la tâche de l’amiral Decoux

l'Amiral Decoux

l’Amiral Decoux

était de maintenir la souveraineté française sur l’Indochine et qu’il ne pouvait y parvenir qu’en demeurant ouvertement, publiquement fidèle au gouvernement du maréchal Pétain  ».

Cette fidélité était, aux yeux des Japonais, la garantie «  de la neutralité du Gouvernement général dans la guerre du Pacifique  ».

Si l’amiral avait adopté un ton nettement plus réservé vis-à-vis de Vichy

l'amiral decoux représentant de Vichy

l’amiral decoux représentant de Vichy

plus mesuré vis-à-vis des Alliés et de la “ France libre ”, «  les Japonais, le soupçonnant de mener un double jeu, n’auraient pas, devant la perspective d’une rupture, tergiversé pendant quatre ans

De juin 1940 à avril 1941, la colonie et son armée affrontent leurs premières difficultés : les premiers combats entre Français et Japonais se situent autour de Langson ; les accrochages franco-siamois constituent des péripéties dans cette Asie du Sud-Est.

Au lendemain de Pearl Harbor (7décembre 1941), le gouvernement japonais exige et obtient du gouvernement de Vichy un système qui conserve la domination coloniale ancienne, mais intègre l’Indochine dans la « sphère de co-prospérité asiatique » en faisant participer l’économie indochinoise à l’effort de guerre contre les Anglo-Américains, ce modus vivendi durera trois ans.

Par ces concessions, la France conserve une police efficace, une armée libre de ses mouvements ; ses fonctionnaires continuent à administrer le pays ; la souveraineté française est respectée. Le but de l’amiral Decoux est de maintenir cet équilibre qui, pour lui, préserve l’essentiel.

Le débarquement allié en Normandie et l’effondrement du régime pétainiste qui s’ensuivit créent une situation nouvelle en Indochine. Arguant que le territoire obéit au nouveau pouvoir qui leur a déclaré la guerre, les Nippons de Saïgon s’accordent à penser que l’élimination de la France ne saurait tarder.

À partir de 1943, dans le cadre de la stratégie alliée de libération de l’Asie, le général de Gaulle décide la reconquête de la péninsule indochinoise. 

Le BCRA puis la Direction Générale des Études et des Recherches (DGER),son successeur en 1945, sont chargés des actions de recherche du renseignement ainsi que des opérations clandestines contre les forces d’occupation japonaises.

Le Service est implanté à cet effet sur deux théâtres d’opérations, en Inde et Chine, sous les appellations respectives de Section de Liaison Française en Extrême Orient (SLFEO) et de Mission Militaire Française (MMF).

En mars 1943, le commandant François de Langlade, directeur général d’une plantation de caoutchouc en Malaisie, qui assure depuis 1941 les missions les plus délicates du BCRA dans la région, arrive à Meerut en Inde.

Il se voit confier la direction de la French Indochina Country Section (FICS), SA de la SLFEO, mis pour emploi auprès de la Force 136, branche du Special Operations Executive (SOE) pour le Sud-Est asiatique.

Au 3 mars 1945, 121 parachutages sur 220 tentés fournissent à l’Indochine 32 postes radio B2, 183 récepteurs radio Midget, plus de 4 500 armes diverses, des munitions, 4 tonnes d’explosif, du matériel divers, du ravitaillement et des médicaments.

Parallèlement, des contacts sont pris auprès des autorités de Tchang Kai-chek par le colonel Zinovi Pechkoff, chef de la MMF établie en Chine à Chongqing.

PRINTEMPS-ETE 1945 :
La Section de Liaison Française en Extrême-Orient (S.L.F.E.O.) composée à l’origine par des officiers d’Indochine ayant rejoint la «France Libre» et renforcée par des éléments venus de France ou d’Afrique du Nord, est installée, aux Indes à Calcutta, à Ceylan et en Chine à Kunming (Yunnan).
La Mission Militaire Française à Kunming (ex-Yunnan-Fou et chef-lieu de la province du Yunnan), appelée aussi « Mission 5», centrale de renseignements installée par la D.G.E.R., a été créée en 1943.

Elle est dirigée par Jean Sainteny et a pour mission de reprendre pied le plus tôt possible en Indochine.

À la mi-avril 1945, Jean Sainteny,

mr sainteny

mr sainteny

un des piliers du réseau Alliance, arrive en Chine comme chef de la Mission 5 (MMF) ,volontaire pour l’Indochine, il prend, en mars 1945, la direction de la mission militaire française à Kunming ; il est ainsi le premier officier français à reprendre pied à Hanoï après l’effondrement japonais et coordonne, depuis Kunming, le travail de ces missions officielles, avouées ou clandestines, implantées le long de la frontière sino-tonkinoise, destinées à entretenir, entre autres, les relations avec la résistance intérieure du général Mordant alias « Narcisse ».

Ces réseaux sont implantés :

  • au Tonkin (« Rivière »),
  • en Annam (« Médéric » et « Pavie »)
  • en Cochinchine (« Legrand »),
  • au Cambodge (« Mangin ») 
  • au Laos (« Donjon »).

C’est à Kunming que se trouvent tous les états-majors alliés, américains, chinois, anglais et français.

Il y a en plus à Tchongking une représentation diplomatique française auprès du gouvernement chinois de Tchang Kaï-chek.

Faisant la différence entre « mauvais » et « bons » Français : les fascistes (Pétain, Decoux) et les démocrates (gaullistes, résistants),

Hô Chi Minh

Ho-chi-minh-jeune

Ho-chi-minh-jeune

prend contact durant le printemps 1945 avec la Délégation Militaire Française à Kunming et avec les troupes du Général Alessandri.

Général Alessandri

Général Alessandri

Une entrevue politique est prévue début août entre Sainteny et Hô Chi Minh.

sainteny et ho chi min

sainteny et ho chi minh

Dans la soirée du 9 mars 1945 se déclenche le coup de force japonais. L’Indochine française engage le combat dans les plus mauvaises conditions. Vu les renforts qu’ils viennent de recevoir, les Japonais ont la supériorité du nombre et de l’armement. A cette force moderne et opérationnelle, l’armée coloniale, force de souveraineté, n’a à opposer qu’un matériel médiocre et vieilli (équipement de 1940). Compte tenu de l’imbrication des unités en présence, la surprise est un des éléments déterminants du succès japonais.

Sans complicité profonde de la population, les Français, militaires et civils, vont ainsi se battre pour l’honneur, loin de tout et de tous. Ils ne se laisseront pas neutraliser comme l’armée d’armistice en Métropole, en novembre 1942.

Les exactions subies par les prisonniers de guerre firent de terribles ravages dans les camps de représailles dont les plus sinistres furent ceux de Hoa-Binh, instaurés par la Kempétaï, réplique de la Gestapo.

PRINTEMPS 1945 :
Le Viêt-Minh se répand dans une zone de six provinces le long de la frontière avec la Chine et impose son administration.
Une conférence tenue le 4 juin crée une fédération de ces six provinces.

Le courrier transitant par les vaguemestres d’étapes qui desservent Kandy (Ceylan), Meerut (New-Delhi) la Mission Militaire Française en Chine et de Kunming, les troupes françaises de Chine et les différents agents de renseignements dans le Sud-est asiatique est difficile à identifier.

Néanmoins, on connaît :

  • des lettres en franchise en provenance de Français en Birmanie avec cachet circulaire double cercle bleu ou violet «* POSTE AUX ARMEES */ Le Vaguemestre d’Étapes» centre évidé, date au composteur ( 17 ou 21 SEP 1945) et mention manuscrite sur certains plis «VE 180».
  • Les quelques plis connus sont censurés au départ par une censure bilingue «CENSORED BY» et cachet à l’ancre « MISSION MILITAIRE FRANÇAISE AUPRES DU S.E.A.C. / – LE GENERAL – // R (ancre) F ».

 

  • On connaît également une autre griffe de censure « OUVERT PAR L’AUTORITE MILITAIRE FRANCAISE / PASSED BY FRENCH / MILITARY CENSORR » .
mission militaire française au Yunnan CELLULE D.G.E.R

mission militaire française au Yunnan CELLULE D.G.E.R

  • ces plis sont rarissimes…….

DÉBUT AOÛT 1945 :
Rencontre entre Jean Sainteny et Nguyên Tong Tam, chef du parti V.N.Q.D.D. et futur Ministre des Affaires Étrangères, qui ne lui cache pas que les nationalistes tenteront de profiter de la faiblesse de la France.
La Mission Sainteny reçoit, à Kunming, par l’intermédiaire d’un émissaire américain, une déclaration de la «Viêt-Nam League» assez modérée qui propose un parlement vietnamien élu, et un gouvernement dirigé par les Français après approbation du parlement, et ce, jusqu’à l’indépendance qui aurait lieu dans un délai de cinq ans après juste indemnisation des Français expropriés.

Sainteny fait une réponse d’attente faute d’instructions de Paris.

Après la capitulation du Japon en août 1945 et selon les accords alliés de Postdam, le désarmement des troupes japonaises sera assuré, au nord du 16eparallèle, par les troupes de la Chine nationaliste, au sud par l’armée britannique.

Avant l’arrivée des forces alliées, et prenant le parti nationaliste

Insigne VNQDD

Insigne VNQDD

du Việt Nam Quốc Dân Ðảng (VNQDD) de vitesse, le Việt Minh prend le pouvoir à Hanoï en août 1945 (révolution d’août – Cách Mạng Tháng Tám) et proclame, le 2 septembre 1945, la République Démocratique du Viêt Nam (RDVN).

drapeau du Vietnam

drapeau du Vietnam

La création d’une armée populaire est confiée à Võ Nguyên Giáp, qui reçoit le soutien de l’Office of Strategic Studies (OSS) américain.

Ho-chi-minh et les services secrets américains

Ho-chi-minh et les services secrets américains

Afin de mettre en œuvre son projet global d’Union indochinoise, le général de Gaulle nomme Jean Sainteny commissaire de la République pour le Tonkin et le Nord Annam.

Le général Leclerc, commandant du Corps Expéditionnaire Français en Extrême-Orient (CEFEO) arrive à Saïgon le 19 août 1945.

En septembre, le SA s’installe à Saïgon sous la dénomination fictive de « Force du Laos » (1945-1946) et opère en Cochinchine, au Cambodge et au Sud-Annam.

Sainteny négocie avec Hồ Chí Minh la convention préliminaire du 6 mars 1946.

Fin avril, la conférence deFontainebleau ne parvient pas à obtenir la paix entre les parties.

Le 23 novembre, le bombardement d’Haïphong est décidé en représailles aux attentats commis contre les Français.

Le 19 décembre, le massacre de plusieurs milliers de civils vietnamiens sert de prétexte à Võ Nguyên Giáp pour lancer à Hanoï le soulèvement qu’il planifiait.

La guerre d’Indochine (1946-1954) commence…..

indochine-france 1945/1954

indochine-france 1945/1954

sources:  http://www.defense.gouv.fr/dgse/tout-le-site/indochine

      : HISTOIRE DE L’INDOCHINE FRANCAISE DURANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE (1939-1945) RACONTÉE PAR UN APPELÉ

a suivre….

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